Lorsqu’une personne se retrouve aux Soins intensifs de L’Hôpital d’Ottawa, la priorité numéro 1 est de lui sauver la vie. Ce n’est certes là que la première étape. Une importante équipe composée de médecins, de personnel infirmier et de professionnels paramédicaux collabore afin d’aider les patients non seulement à survivre, mais aussi à bien se porter. Michelle Cummings joue un rôle essentiel dans une telle concrétisation. Physiothérapeute aux Soins intensifs de L’Hôpital d’Ottawa depuis 2003, et au Campus Civic depuis 2005, Michelle voit des cas très graves et compliqués. En aidant ces patients à bouger dès que possible, en se servant des dernières technologies et recherches en date pour l’aider dans son travail, Michelle est certaine que les cas les plus complexes obtiennent chaque jour les meilleurs résultats possible.
Lisez la suite pour savoir ce qui, au secondaire, a poussé Michelle à devenir physiothérapeute, et pourquoi elle est enthousiaste à l’idée de s’installer dans le nouvel hôpital une fois ouvert.
Q : Quand vous êtes-vous rendu compte que vous vouliez être physiothérapeute?
R : J’ai choisi la physiothérapie parce que je me suis trop souvent fait des endorses à la cheville au secondaire. J’étais très sportive en grandissant. Pas une athlète professionnelle; loin de moi l’idée de participer aux Jeux olympiques; j’aimais simplement bouger. Je me suis fait trois entorses à la cheville en six mois : la première fois, lors d’un tournoi de badminton – j’ai obtenu la seconde place; puis, lors d’un cours de gymnastique aérobique; et, enfin, en me rendant à un cours d’anglais.
Ma mère qui a eu un accident de voiture croyait beaucoup en la physiothérapie et m’a pris rendez-vous. Lors de ce rendez-vous, le physiothérapeute et moi avons beaucoup discuté, et il m’a proposé un rendez-vous distinct pour me parler de sa profession.
Q : Comment vous êtes-vous retrouvée aux Soins intensifs?
R : À la fin de mes études secondaires, je me suis inscrite à l’Université d’Ottawa pour suivre des cours de physiothérapie et, dans un premier temps, je pensais travailler avec des athlètes au sein d’équipes sportives. Cependant, au cours de mes années universitaires, j’ai fait un stage aux Soins intensifs dans l’un des hôpitaux de Windsor, près d’où j’ai grandi, et ma vie a vite pris une nouvelle direction. Quand je me suis retrouvée dans cet hôpital, je me suis dit, « C’est pas mal; je ne pensais pas que l’on faisait ce genre de travail ».
« Je prends soin de patients qui traversent des moments très difficiles, et j’ai la chance de pouvoir les aider à aller mieux ».
— Michelle Cummings
Bien que je sois une adepte de sport, j’ai eu l’impression que cela correspondait davantage à ma personnalité. J’aime travailler au sein d’une équipe, et aux Soins intensifs. S’il y a un patient extrêmement malade ou gravement blessé à la suite d’un accident de voiture, les médecins et le personnel infirmier font ce qu’ils ont à faire; et les thérapeutes respiratoires, les diététistes, tout le reste de l’équipe font le leur – il existe une véritable entraide pour faire en sorte que ce patient rentre chez lui.
Q : Qu’est-ce qui vous surprend au sujet de la physiothérapie?
R : Les gens ne se rendent pas compte que les physiothérapeutes travaillent dans tous les secteurs de l’hôpital. Quand je leur parle de ma profession, ils disent, « Vous travaillez où?! » Nous travaillons à l’Urgence, aux Soins intensifs, à tous les étages, et nous faisons des consultations dans d’autres services comme en obstétrique, avec des patients externes, et en réadaptation. Nous sommes présents partout. Nous faisons partie de ces équipes, et nous aidons les gens à bouger et à être plus forts.
Q : Vous avez pris soin d’Aida Attar, une jeune femme qui a fait des convulsions en nageant, et qu’il a fallu réanimer. Qu’est-ce qui fait la particularité de son cas?
R : Aida était très jeune à l’époque. La jeunesse est un élément important dans le rétablissement d’une personne. Son cas demeurait certes très grave. Il a fallu attendre qu’elle soit assez éveillée pour commencer la physiothérapie, c’est-à-dire environ un mois après son accident. Au départ, deux personnes la soutenaient, assises de chaque côté sur son lit, et elle pouvait à peine garder la tête droite. Au bout de quelques semaines, avant qu’elle ne quitte les Soins intensifs, elle levait des poids et marchait sur une courte distance sans aucune aide. Nous nous sommes gentiment chamaillées à ce sujet : elle faisait quelques pas en s’aidant d’un déambulateur, et je le lui ai fait parcourir deux mètres avant de lui dire « Tu as marché », ce à quoi elle a rétorqué « Je viens juste de faire un transfert »! » Elle a dit que je voulais simplement être la première à la voir marcher, mais elle a vraiment marché ce jour-là!
Nous avons partagé des larmes et aussi des moments à rire de choses stupides que nous avions toutes les deux vues à la télé. Elle est certes très résiliente. Une fois qu’elle a commencé à marcher, elle a été tellement motivée qu’elle n’avait plus vraiment besoin de moi!
Q : Vous avez participé à une étude intitulée CYCLE (Critical Care Cycling to Improve Lower Extremity Strength, un programme de recherche étudiant la pratique du vélo pour renforcer les membres inférieurs). Qu’est-ce que vous aimez dans la recherche?
R : Cette étude a été intéressante, parce que nous avons utilisé un objet pour faire pédaler des patients des Soins intensifs moyennement confinés au lit afin de voir si nous obtenions de meilleurs résultats. Nous essayons vraiment de faire en sorte que tous les patients qui ne peuvent pas bouger pendant longtemps conservent leur mobilité. Certains patients aiment cela, d’autres le détestent, mais il existe des preuves incontestables qu’un patient récupérera plus vite s’il bouge tôt. Les faire bouger en les faisant pédaler au lit peut être un autre excellent moyen d’y parvenir avec certains patients.
Nous sommes aussi en mesure d’utiliser cet équipement en dehors de l’étude. Nous avions un patient qui avait une tumeur au cerveau et ne pouvait pas marcher, mais qui voulait vraiment bouger. Je jouais sa musique préférée sur mon téléphone – ABBA – il a atteint son objectif de pédaler pendant 10 km au cours d’une journée avant de quitter les Soins intensifs!
J’ai aussi élaboré des mesures de résultats spécialement pour l’étude de recherche SAHaRA. Le groupe étudie le recours aux transfusions sanguines dans le cas d’hémorragies sous-arachnoïdiennes, les saignements dans l’espace autour du cerveau, et les résultats obtenus par les patients au bout de six mois et d’une année. En tant que physiothérapeute travaillant avec des patients qui vivent cela aux Soins intensifs, je n’ai pas toujours de leurs nouvelles par la suite. La recherche est importante et me rappelle que de nombreuses personnes au Canada et dans le reste du monde survivent à des lésions cérébrales, retrouvent leurs fonctions ainsi que leur vie d’avant.
Je suis un peu intello, et j’aime lire des articles. Lorsqu’une occasion de recherche se présente, je la saisis. Même 20 ans plus tard, je continue d’avoir envie de relever de nouveaux défis.
Q : Le nouveau campus de L’Hôpital d’Ottawa sera l’un des hôpitaux les plus modernes et à la fine pointe de la technologie au Canada. Que cela signifiera-t-il pour votre travail?
R : Cela va être génial d’avoir l’espace et la possibilité de faire de grandes choses pour les patients. Actuellement, au Civic, cela peut être compliqué parce que c’est un vieux campus; les chambres sont très petites et l’équipement est encombrant. Faire sortir les patients de leur lit, c’est comme jouer à Tetris.
Les moyens technologiques seront excellents; je n’aurai pas besoin d’utiliser mon téléphone pour écouter ABBA, et il y aura dans chaque chambre un appareil pour soulever les patients et les sortir de leur lit. L’accessibilité y sera bien meilleure. Pouvez-vous imaginer ne pas facilement avoir accès aux toilettes tout simplement parce que vous ne pouvez pas entrer dans la salle de bain? Dans le nouveau campus, cela ne sera plus un problème.
Q : Que faites-vous quand vous n’êtes pas au travail?
R : J’ai deux garçons de 12 et 14 ans; les deux ainsi que mon mari et notre chien, un berger australien croisé avec un caniche nain, sont ma priorité. Comme ils aiment les jeux vidéos, je joue avec eux. Nous faisons beaucoup de randonnée et de camping en famille.
Si je ne suis pas avec ma première ou ma deuxième famille, ma famille professionnelle, je suis avec ma troisième famille : celle du taekwondo. J’y vais régulièrement, sans me faire la moindre entorse à la cheville (jusqu’à présent). Il n’y a rien de plus thérapeutique que de se défouler, maintes et maintes fois, sur un objet inanimé!